Les produits phytopharmaceutiques (PPP) sont utilisés surtout pour protéger les végétaux contre les organismes nuisibles, réguler leur croissance et lutter contre les végétaux indésirables. L’exposition à ces substances et à leurs résidus peut présenter des risques pour la santé humaine et l’environnement. La directive 2009/128/CE q impose des plans d’action nationaux[1] en vue de réduire ces risques et d’encourager l’introduction de méthodes de substitution.
Des usages majoritairement professionnels
En 2021, la quantité totale de substances actives (s.a.) de PPP vendues en Belgique s’élevait à 5 429 t. Les parts liées aux utilisateurs professionnels[2] et non professionnels (particuliers) q représentaient respectivement 96,1 % (5 218 t) et 3,9 % (211 t).
Les quantités totales de s.a. de PPP vendues en Belgique ont diminué entre 1995 et la période 2010 - 2021, passant de 10 512 t en 1995 à 6 075 t en moyenne sur la période 2010 - 2021. Différents facteurs peuvent expliquer cette diminution, parmi lesquels des restrictions/interdictions d’usage de s.a. dont les doses autorisées étaient élevées, la substitution de s.a. appliquées à une dose à l’hectare élevée par des s.a. de nouvelle génération efficaces à de plus faibles doses et le développement d’outils d’aide à la décision (réseaux d’observations et d’avertissements[3]). Entre 2010 et 2021, les quantités totales de s.a. vendues ont oscillé entre 5 141 t (valeur min. en 2010) et 7 036 t (valeur max. en 2014), notamment en fonction des conditions météorologiques plus ou moins favorables au développement de certaines maladies. À noter qu’entre 2018 et 2021, une baisse des quantités vendues est observée.
La part des quantités vendues aux utilisateurs non professionnels s’est fortement réduite entre 2005 et 2010 : de 30 % en 1995 et en 2005, elle a oscillé entre 2,2 % et 3,9 % pour la période 2010 - 2021, à l’exception de l’année 2018 où elle s’élevait à 6,0 %. Cette baisse importante est principalement due au retrait du marché du chlorate de soude en 2009 et à la diminution des ventes de sulfate de fer[4]. La valeur observée en 2018 s’explique par la hausse des ventes d’herbicides, défanants et agents antimousse, suite à l'interdiction du glyphosate[5], substitué par l’acide pélargonique et l’acide acétique[6].
Ventes de produits phytopharmaceutiques en Belgique, par types d’utilisateurs
* Agriculteurs, entrepreneurs de parcs et jardins, gestionnaires des infrastructures ferroviaires, gestionnaires des espaces publics...
** Particuliers.
* Agriculteurs, entrepreneurs de parcs et jardins, gestionnaires des infrastructures ferroviaires, gestionnaires des espaces publics...
** Particuliers.
Herbicides et fongicides en tête des ventes chez les utilisateurs professionnels
À l’échelle de la Belgique, le groupe des herbicides, défanants et agents antimousse représentait 40,2 % des ventes (2 096 t) en 2021, soit les ventes les plus élevées de s.a. chez les utilisateurs professionnels. Le glyphosate était l'herbicide le plus vendu (582 t) suivi par le prosulfocarbe (188 t). Le groupe des fongicides et bactéricides représentait quant à lui 36,3 % des ventes attribuables aux utilisateurs professionnels (1 892 t)[7], les fongicides les plus vendus étant le propamocarbe (323 t) et le mancozèbe (285 t)[8].
Sur la période 1995 - 2021, les herbicides, défanants et agents antimousse et les fongicides et bactéricides constituaient les groupes de substances actives les plus vendues (en moyenne, 78,1 % des quantités vendues).
Ventes de produits phytopharmaceutiques en Belgique aux utilisateurs professionnels*, par grands groupes de substances actives
Ventes de produits phytopharmaceutiques en Belgique aux utilisateurs professionnels*, par grands groupes de substances actives
* Agriculteurs, entrepreneurs de parcs et jardins, gestionnaires des infrastructures ferroviaires, gestionnaires des espaces publics...
* Agriculteurs, entrepreneurs de parcs et jardins, gestionnaires des infrastructures ferroviaires, gestionnaires des espaces publics...
En 2021, chez les utilisateurs non professionnels, les ventes de s.a. les plus élevées concernaient le groupe des herbicides, défanants et agents antimousse (182 t, soit 86,3 %). Parmi ceux-ci, l’acide pélargonique était l’herbicide le plus vendu (119 t), suivi par le sulfate de fer (35 t) et l’acide acétique (28 t).
Les pommes de terre nécessitent plus de PPP que les autres cultures[9]
En Wallonie, les pommes de terre de conservation présentaient en 2021 la dose d’utilisation la plus élevée (19,4 kg de s.a./ha). Elles étaient suivies des betteraves sucrières (5,2 kg/ha) et du froment d'hiver (1,8 kg/ha). Les prairies temporaires et les prairies permanentes se caractérisaient par les doses d'utilisation les plus faibles (respectivement 0,03 kg/ha et 0,05 kg/ha). Entre 2004 et 2021, les doses utilisées présentaient une tendance relativement stable, à l’exception des pommes de terre pour lesquelles les pics observés peuvent être reliés aux conditions météorologiques favorables au développement du mildiou.
Doses de substances actives de produits phytopharmaceutiques appliquées sur les principales cultures en Wallonie*
Doses de substances actives de produits phytopharmaceutiques appliquées sur les principales cultures en Wallonie*
* Extrapolation à l'échelle de la Wallonie à partir des données du réseau d'information comptable agricole du SPW ARNE - DEMNA pour 17 cultures.
* Extrapolation à l'échelle de la Wallonie à partir des données du réseau d'information comptable agricole du SPW ARNE - DEMNA pour 17 cultures.
Pour compléler l'analyse de ces données, il convient de tenir compte des superficies dévolues à ces cultures en Wallonie q. En 2021, les prairies permanentes se démarquaient de toutes les autres cultures par l’importance des superficies qu’elles occupaient (263 903 ha en agriculture conventionnelle) et par des quantités totales de s.a. utilisées réduites (14 t). Le froment d'hiver représentait la 2ème culture la plus importante en termes de superficie (126 481 ha) et de quantités totales de s.a. utilisées (232 t). Quant aux pommes de terre de conservation, elles occupaient une superficie approximativement trois fois plus faible que celle du froment d’hiver (38 797 ha) mais se caractérisaient par les quantités totales de s.a. utilisées les plus élevées (753 t).
Relation entre la quantité totale de substances actives de produits phytopharmaceutiques appliquées sur les principales cultures* et leur superficie en Wallonie (2021)
Relation entre la quantité totale de substances actives de produits phytopharmaceutiques appliquées sur les principales cultures* et leur superficie en Wallonie (2021)
* Extrapolation à l'échelle de la Wallonie à partir des données du réseau d'information comptable agricole du SPW ARNE - DEMNA pour 17 cultures.
* Extrapolation à l'échelle de la Wallonie à partir des données du réseau d'information comptable agricole du SPW ARNE - DEMNA pour 17 cultures.
Des doses d’utilisation plus élevées dans le nord de la Wallonie
Les utilisations agricoles de PPP ne sont pas homogènes sur le territoire wallon. En considérant les principales cultures hors prairies permanentes, en 2021, la Campine hennuyère, la Région limoneuse et la Région sablo-limoneuse présentaient les doses moyennes d’utilisation les plus élevées, avec 5,1 kg de s.a./ha, 4,8 kg/ha et 4,4 kg/ha respectivement. La Haute Ardenne et l’Ardenne affichaient la dose moyenne d'utilisation la plus faible (0,7 kg/ha). Ces différences s’expliquent par l'importance relative de ces grandes cultures dans les différentes régions agricoles q : les pommes de terre, les betteraves sucrières et le froment d'hiver sont surtout présents au nord de la Wallonie, alors que les prairies temporaires et le maïs fourrager dominent au sud et à l’est.
Dose moyenne de substances actives de produits phytopharmaceutiques appliquée sur les terrains agricoles en Wallonie* (2021)
* Extrapolation à l'échelle de la Wallonie à partir des données du réseau d'information comptable agricole du SPW ARNE - DEMNA pour 16 grandes cultures d'une part et pour les prairies permanentes d'autre part.
** Terrains agricoles non dédiés aux 16 grandes cultures ou aux prairies permanentes, terrains agricoles en agriculture bio, terrains artificialisés, terrains boisés...
Des mesures pour tenter de réduire l'utilisation et les risques des PPP
Diverses mesures visant à réduire l’utilisation et les risques des PPP ont été prises en Wallonie suite à la mise en œuvre des deux premiers programmes wallons de réduction des pesticides (PWRP 2013 - 2017 q et PWRP 2018 - 2022 q) : l’interdiction d’utiliser des PPP dans les espaces publics (depuis le 01/06/2019), le respect d’une zone tampon de 6 m le long des eaux de surface (depuis le 01/09/2014)… Le PWRP 3 (PWRP 2023 - 2027) q maintient certaines mesures des PWRP précédents et en propose d’autres (favoriser l’investissement pour l’achat d’équipements permettant de réduire l’utilisation des PPP et encourager les achats groupés de tels équipements p. ex.).
Au niveau européen, la Commission européenne a élaboré en 2020 la Stratégie "De la ferme à la table" (Farm to Fork Strategy) q, qui vise une réduction de 50 % de l’utilisation et des risques des PPP chimiques ainsi que de l’utilisation des PPP les plus dangereux d’ici 2030 par rapport à la moyenne de la période 2015 - 2017[10]. Ces objectifs ont été repris dans le PWRP 3. La proposition de règlement européen devant rendre ces objectifs contraignants a cependant été rejetée par le Parlement fin 2023. Son retrait a ensuite été annoncé début 2024.
[1] En Belgique, le plan d’action national (Nationaal actie plan d’action national, NAPAN) comprend un plan d’action fédéral et un plan d’action pour chaque Région. Le Programme wallon de réduction des pesticides (PWRP) représente le plan d’action wallon.
[2] Agriculteurs, entrepreneurs de parcs et jardins, gestionnaires des infrastructures ferroviaires, gestionnaires des espaces publics...
[3] Pour une culture donnée et un organisme nuisible donné, avis diffusé aux agriculteurs concernant la nécessité de réaliser ou non un traitement phytosanitaire sur base des observations faites à la parcelle et des conditions météorologiques.
[4] Cette diminution s’explique par une utilisation croissante d’antimousses à base d’EDTA disodique et de sulfate de fer en remplacement de produits composés uniquement de sulfate de fer, la dose efficace d’un produit avec EDTA disodique étant nettement plus faible que celle d’un produit n’en contenant pas.
[5] En 2018, la Belgique a interdit la vente et l’utilisation par des utilisateurs non professionnels d’herbicides totaux (glyphosate p. ex.) ou sélectifs, à l’exception des PPP à faible risque et des PPP contenant des micro-organismes, des extraits de plantes et des substances naturelles (AR du 16/09/2018 q). Pour plus d’informations, voir le site internet de Phytoweb q.
[6] La hausse des ventes d’acide pélargonique et d’acide acétique s’explique par plusieurs facteurs, dont notamment le retrait du glyphosate pour les utilisateurs non professionnels q, la substitution de produits commerciaux contenant du glyphosate par des produits de dénomination identique mais contenant de l’acide pélargonique ou de l’acide acétique, et des concentrations élevées en acide pélargonique et en acide acétique dans les produits commerciaux mis sur le marché.
[7] En 2021, les quantités vendues de bactéricides étaient nulles. Il s’agissait exclusivement de fongicides.
[8] Le propamocarbe et le mancozèbe sont deux s.a. principalement utilisées pour lutter contre le mildiou en culture de pommes de terre. Entre 2010 et 2020, le mancozèbe représentait la s.a. la plus vendue aux utilisateurs professionnels, tous groupes de s.a. confondus. Entre 2020 et 2021, ses ventes ont fortement chuté, passant de 901 t à 285 t, une baisse qui s’explique en grande partie par le retrait de la s.a. du marché à la suite du non-renouvellement de son autorisation au niveau européen. D’autres s.a. fongicides telles que le propamocarbe ont vu dès lors leurs ventes augmenter en 2021 (323 t en 2021 versus 125 t en 2020).
[9] Extrapolation à l’échelle de la Wallonie à partir des données du réseau d’information comptable agricole du SPW ARNE - DEMNA pour 17 cultures.
[10] Pour plus d’informations, consulter la page internet de la Commission européenne dédiée aux objectifs de la Stratégie "De la ferme à la table" pour les pesticides q.
Évaluation
Évaluation de l'état non réalisable et tendance globalement stable
Pas de référentiel.
Le Programme wallon de réduction des pesticides (PWRP) 2018 - 2022 q ne contenait pas d’objectifs chiffrés concernant les quantités de substances actives (s.a.) de produits phytopharmaceutiques (PPP) vendues et/ou utilisées.
Les objectifs non contraignants de la Stratégie "De la ferme à la table" (Farm to Fork Strategy q) sont fixés à l’horizon 2030 (réduction de 50 % de l’utilisation et des risques des PPP chimiques ainsi que de l’utilisation des PPP les plus dangereux d’ici 2030 par rapport à la moyenne de la période 2015 - 2017). Ces objectifs ont été repris dans le PWRP 3.
Entre 2011 et 2021, les quantités de s.a. de PPP utilisées sur les principales cultures wallonnes (14 cultures considérées, représentant en moyenne 85,2 % de la SAU wallonne) sont restées globalement stables (entre 1 224 t de s.a. et 1 652 t de s.a. selon les années).
En toute rigueur, l'évaluation de la tendance devrait tenir compte des quantités utilisées par le secteur agricole wallon toutes cultures confondues, ainsi que des quantités utilisées par les autres types d'utilisateurs en Wallonie.
Il faut noter qu’une diminution des quantités utilisées ne signifierait pas pour autant une diminution des risques liés à l’utilisation des PPP, le risque étant fonction de nombreux facteurs dont la toxicité des s.a.